La santé des conducteurs, un enjeu essentiel pour une conduite automobile plus sûre – mais comment l’évaluer ? Avec AptiConduite !
Crée le 07/10/24
La capacité d’un conducteur à se déplacer de manière autonome dépend en grande partie de son état de santé et de son aptitude à conduire en toute sécurité. Les évaluations de la conduite automobile jouent un rôle majeur en particulier pour les personnes âgées ou en situation de handicap, et il est estimé que 20 000 personnes doivent se faire évaluer par an.
AptiConduite, la suite logique du banc de test Becape
Le banc d’évaluation de conduite Becape a été développé en 2013 afin de tester les capacités motrices et cognitives des conducteurs handicapés à la suite d’un accident ou d’une pathologie. En 2019, Becape a également intégré des tests spécifiquement créés pour tester les capacités visuelles et cognitives des conducteurs. Il est aujourd’hui commercialisé dans une trentaine de centres de rééducation en France.
Ces évaluations jouent un rôle majeur pour déceler les aptitudes indispensables à l’activité de conduite en particulier pour les personnes âgées ou en situation de handicap, mais il est nécessaire d’aller encore plus loin.
L’équipe à l’origine du banc Becape, qui est aujourd'hui devenu le logiciel Becape, issue du CEREMH et du laboratoire d’ingénierie des systèmes de Versailles démarre une nouvelle collaboration avec le service de Médecine physique et de réadaptation du CH de Plaisir. Ensemble, il se propose d’étudier et de valider une nouvelle méthode de détection sur simulateur de conduite des troubles d’exploration visuelle et d’autres troubles neuro-visuels. Le simulateur sera un outil d’aide à la réalisation de ces évaluations et permettra de :
- Proposer une évaluation et d’orienter les patients ;
- Compenser le faible réseau d’autoécole aménagée.
Pourquoi est-il si important de tenir compte des troubles neuro-visuels dans ces évaluations ?
Outre les personnes concernées par les tests d’évaluation de conduite en raison de handicap depuis la naissance, ou à la suite d’un accident ou de vieillissement, il faut également tenir compte des personnes à risque d’un AVC*. Le risque d’AVC représente 30 000 cas par an en France dont 18 000 sur les personnes entre 54 et 65 ans**. La négligence spatiale unilatérale (NSU) concerne l'incapacité ou la lenteur à porter son attention du côté opposé à la lésion cérébrale. Ces difficultés ne proviennent pas d'une perte de la vision, mais d'un trouble attentionnel. La NSU est présente chez 40% des victimes d'un AVC.
Les conducteurs souffrant de troubles de l’exploration visuelle et autres troubles neuro-visuels peuvent rencontrer des difficultés à changer de voie, à conduire dans les espaces étroits ou à surveiller les voitures venant de leur côté négligé, c’est-à-dire le côté impacté par la lésion cérébrale. Ils peuvent également avoir des problèmes à réagir rapidement aux signaux de la circulation, aux feux de signalisation et aux piétons qui traversent la rue.
Ces conducteurs sont donc plus à risque d’être impliqués dans un accident de la route. Pour y faire face, il est nécessaire de prendre des mesures pour minimiser les risques liés à la conduite automobile, qu’il s’agit de mesures de compensation liée à la rééducation ou des adaptations du véhicule en compensation de ces troubles.
Les bénéfices de la réalité virtuelle et des tests sur simulateurs
Il a déjà été prouvé que des tests ayant recours à la réalité virtuelle sont plus bénéfiques aux patients atteints de NSU que les méthodes conventionnelles. L’équipe avance l’hypothèse qu’ils espèrent valider en 2 année d’étude qu’un environnement simulé, couplé à une analyse automatisée basée sur l’intelligence artificielle, permet d’améliorer l’analyse et le dépistage de troubles d’exploration visuelle, ainsi que d’autres troubles neuro-visuels.
Le simulateur de conduite proposé utilisera l’IA dans les scénarios de test pour obtenir une analyse plus précise et la plus objective possible de l’aptitude à conduire. Le travail sera principalement axé sur :
- La détection de stimuli, par exemple un piéton, une signalisation ou à un feu tricolore ;
- L’étude de la réponse à cette détection, si elle est appropriée ou pas ;
- L’orientation de l’attention vers des stimuli différents en termes de priorisation ou d’inhibition.
L’évolution du niveau de performance au cours de séance d’évaluation indiquera un niveau de fatigue identifiable chez le patient. Selon le niveau de performance du patient sur le critère de détection et du positionnement de son regard, il sera possible d’alerter sur un risque de NSU.
Déclencher les troubles neuro-visuels pour mieux évaluer la conduite
Afin de créer une méthodologie pour des cliniciens de centres de rééducation, les données de référence seront fondées sur les petites cohortes de patients sains et de patients déjà atteints de troubles neuro-visuels. Elles vont servir de base à la fois pour les échanges avec les équipes et pour les premières analyses. Cette base de données sera complétée tout au long de projet par la mise à disposition du simulateur équipé d’un grand écran courbé au centre hospitalier de Plaisir et au CEREMH.
Les données initiales seront obtenues à partir des résultats de 4 scénarios de test ayant l’objectif de dépister, voire déclencher, les troubles neuro-visuels, tels que les omissions, les temps de réaction de l’exploration spatiale. Les résultats seront complétés par des mesures biométriques telles que :
- La captation de la position du regard, les zones de fixation et les oscillations ;
- L’enregistrements de la position de la tête ;
- Un capteur ECG (électrocardiogramme) pour détecter la fréquence cardiaque et ses variations ;
- Un capteur EDA (activité électrodermal et d’activité physique) pour mesurer le niveau de stress ;
- Un EEG (électroencéphalogramme) pour évaluer le niveau d’activité cérébrale ;
- Enregistrement vidéo du conducteur.
En fin de projet, il est prévu de :
- Publier une veille sur les pratiques d’évaluation des troubles attentionnels et neuro-attentionnels en centre de rééducation dans le cadre de l’évaluation d’aptitude à la conduite ;
- Publier et diffuser la méthode validée ;
- Partager les données anonymisées afin de permettre la poursuite des recherches et des connaissances sur le sujet à autrui ;
- Déployer, si possible, la méthode et son instrumentation en situation réelle sur route ;
- Publication des résultats lors des congrès et dans les revues scientifiques.
*AVC – Accident Vasculaire Cérébral
**Négligence spatiale unilatérale : des approches thérapeutiques multiples - Neurologies
Ce projet a été initié et est majoritairement financé par la Délégation à la sécurité routière dans le cadre de son appel à projet.