Ce projet ambitieux est développé grâce à l’électronique intégrée à la monture des lunettes
Crée le 30/09/20, modifié le 01/09/23
Ellcie Healthy en collaboration avec le Laboratoire Motricité Humaine, Expertise, Sport, Santé (LAMHESS) de l’Université Côte d’Azur et la plateforme fragilité du CHU de Nice cherche à savoir si les lunettes connectées pourront être LA solution innovante pour prévenir les risques de chute auprès des personnes âgées.
Pas moins de 15 capteurs dont un accéléromètre, un gyroscope, des capteurs de mouvements des paupières, un capteur de pression atmosphérique de température, de pression atmosphérique… permettent de recueillir de nombreuses informations pertinentes. Certains capteurs peuvent donc être utilisés pour évaluer des mouvements simples de la vie quotidienne tel que le lever de chaise ou encore la marche. Cependant, peu ou pas d’études se sont intéressées au positionnement optimal des capteurs.
Quelle est la position optimale des capteurs ? Le débat est ouvert…
A ce jour, aucun consensus n’a été atteint concernant la position optimale des capteurs pour étudier des mouvements comme lever de chaise ou certains mouvements de la vie quotidienne. Pour l’étude des mouvements comme la course ou la marche, certains travaux révèlent qu’un positionnement au niveau de la 7e vertèbre cervicale serait plus efficace qu’un capteur positionné au niveau de la hanche. Pour ce qui concerne la chute, une étude récente montre qu’un capteur autour de la taille semble plus performant qu’un capteur fixé derrière la tête pour la détection des chutes. Selon les chercheurs cette observation est surprenante car l’accélération de la tête lors d’une chute devrait être plus importante que celle d’un capteur positionné au niveau de la taille. . Toutefois, ce résultat a été attribué au fait que les chutes analysées pendant l’étude étaient volontaires et simulées. Il est possible que la tête reste plus stable lors d’une chute volontaire que lors d’une chute involontaire. Par conséquent, l’intérêt de positionner des capteurs au niveau de la tête pour analyser des mouvements de la vie quotidienne doit être confirmé au niveau expérimental.
Pourquoi via les lunettes connectées ?
60 % de la population mondiale porte des lunettes. En vieillissant, ce pourcentage augmente de près de 90 % pour les personnes de 75 ans et plus. De plus, de nombreuses personnes portent des lunettes pour se protéger du soleil ou pendant la pratique des activités sportives Ainsi, intégrer des capteurs de mouvement dans un objet de la vie courante, porté par beaucoup de personnes, pourrait faciliter la collecte des données biomécaniques pendant des mouvements tels que la course à pied, à la marche ou dans le cas de cette étude, au mouvement de transition assis/debout ou « lever de chaise ». Ce mouvement, qui au premier abord paraît simple, nécessite d’importantes capacités musculaires, mais aussi un bon niveau de contrôle de coordination et d’équilibre. En essence, c’est la base de toute activité locomotrice, mais c’est également un indicateur du déclin des capacités physiques, et à ce jour, personne n’a pensé à l’étudier grâce à un accéléromètre intégré dans les lunettes !
Méthodologie
L’objectif de cette première étude était donc de valider l’utilisation des lunettes connectées intégrant un accéléromètre par rapport à une méthode dite « gold standard » (i.e., système d’analyse de mouvement en laboratoire) en vue de reconnaître le mouvement de lever de chaise. 19 participant.e.s, jeunes et en bonne santé ont effectué des mouvements de lever de chaise au cours de 2 séances de tests espacées d’une semaine (chaque séance comprenant 60 mouvements au total ; 15 à une vitesse lente, 15 à une vitesse confortable et chaque vitesse effectuée avec ou sans collier de maintien cervical). Le protocole exigeait que chaque mouvement soit accompli avec les bras croisés sur le torse, en démarrant la mouvement assis sur une chaise d’une hauteur de 45 cm et en se mettant debout. Pour tester la fiabilité du système, les participants portaient des lunettes connectées avec un accéléromètre intégré, ainsi qu’un capteur de mouvement synchronisé à un système d’analyse de mouvement composé de 6 caméras optoélectroniques.
Résultats
Globalement aucune différence n’a été observée entre les mouvements réalisés avec ou sans collier aux deux vitesses, ce qui suggère que la tête reste stable même sans collier cervical. Les valeurs d’accélération verticale enregistrées par les lunettes étaient équivalentes à celles enregistrées par le système optoélectronique. La fiabilité relative des lunettes pendant les 15 tests, toutes conditions expérimentales confondues, est excellente. De plus l’erreur-type de mesure au cours des différentes sessions et conditions de test était de moins de 10 %, indicatif d’une fiabilité absolue excellente. Enfin, les mesures effectuées grâce aux lunettes sont corrélées aux mesures recueillies grâce à la méthode « gold standard ». Par conséquent, l’utilisation des lunettes pour évaluer l’accélération verticale pendant la transition assis/debout au cours d’un mouvement de lever de chaise est hautement fiable et reproductible.
Des lunettes connectées, une piste prometteuse ?
La comparaison de ces résultats avec d’autres études est difficile car aucune autre étude n’a cherché à mesurer des accélérations verticales lors de mouvements de lever de chaise. Cependant, une étude récente montre qu’en plaçant des capteurs de mouvement au niveau de la hanche chez des personnes âgées, permettait également d’avoir des informations pertinentes sur le mouvement comparativement à une méthode standard utilisant une plateforme de force. Ces chercheurs ont remarqué une forte similitude entre les valeurs issues de ces deux méthodes en ce qui concerne l’accélération verticale de la hanche. En considérant ces résultats et ceux obtenus dans le cadre de cette première étude, il semblerait que le recueil d’accélération verticale via des lunettes connectées soit très pertinent dans l’analyse de mouvement de la vie quotidienne.
La suite de la recherche…
En conclusion, l’utilisation des lunettes intégrant un accéléromètre est reproductible et légitime pour mesurer l’accélération verticale lors du mouvement de lever de chaise. Comme ce mouvement est automatisé pour la plupart d’entre nous, il est possible de l’évaluer hors du laboratoire dans des conditions écologiques, par exemple à l’hôpital ou au domicile. Dans ce cas et en faisant un suivi des de l’évolution des caractéristiques biomécaniques du mouvement, on pourrait alors détecter une diminution potentielle des capacités physiques et prévenir la chute des personnes âgées. Les travaux à venir doivent caractériser les valeurs d’accélération verticale via ces lunettes connectées auprès d’une cohorte composée de seniors « chuteurs » et « non-chuteurs ».
Synthèse de l'article d'origine "Sit-To-Stand Movement Evaluated Using an Inertial Measurement Unit Embedded in Smart Glasses - A Validation Study". Auteurs : Justine Hellec, Frédéric Chorin, Andrea Castagnetti et Serge S. Colson. Publié le 02 septembre 2020