Enquête : en 2021, les usages du smartphone au volant toujours plus complexes et ancrés dans nos habitudes
Créé le 19/04/22, modifié 23/02/23
Selon le dernier baromètre « Usages du smartphone au volant » publié chaque année par la Fondation MAIF et l’Université Gustave Eiffel, 82% des conducteurs français déclarent utiliser un écran au volant en 2021 (smartphone, GPS, etc.) et plus de 50% d’entre eux affirment utiliser leur téléphone en conduisant. Chaque année, malgré les campagnes de sensibilisation et les mesures gouvernementales, ces taux ne cessent d’augmenter. Le téléphone est toujours considéré́ comme très utile pendant la conduite et aussi très distracteur, encore plus en 2021. Le baromètre met en avant des usages toujours plus complexes, variés et dangereux en termes de sécurité routière, avec toutefois, des comportements plus sécurisés et une utilisation plus raisonnée et fréquente des outils dédiés (kits mains libres, kits intégrés, commandes vocales…).
Smartphone au volant : un usage ancré dans nos habitudes
Téléphoner en conduisant détourne obligatoirement l'attention et multiplie par 3 le risque d'accident selon la Délégation à la sécurité routière. Depuis mai 2020, les sanctions se sont durcies avec un retrait de permis immédiat pour les automobilistes commettant une infraction au code de la route et qui tiendraient leur téléphone à la main. Et pourtant, malgré ces mesures plus répressives et une prévention accrue, les conducteurs français ont du mal à abandonner leurs mauvaises habitudes.
Selon le baromètre des usages du smartphone au volant réalisé par la Fondation MAIF et l’Université Gustave Eiffel, la part des conducteurs utilisant leur smartphone au volant augmente chaque année : 43% en 2017, 46% en 2018, 49% en 2019 et un peu plus de 50% en 2021. Un usage lié à l’âge puisque 64% des moins de 45 ans utilisent leur smartphone en conduisant, et qui s’intensifie avec les kilomètres parcourus (57% de ceux qui font plus de 15 000km/an). On notera que la différence entre professionnels et non professionnels s’est estompée en 2021, potentiellement liée avec la diminution de la conduite pendant la crise sanitaire.
En raison de la pandémie, les conducteurs ont également déclaré avoir parcouru moins de kilomètres (télétravail, moins de déplacements de loisirs ?), ce qui rend les résultats un peu plus difficilement comparables avec les années précédentes. Néanmoins, force est de constater qu’un peu plus de la moitié des conducteurs utilisent toujours leur smartphone au volant en 2021. Et le téléphone n’est pas le seul écran utilisé à bord des véhicules puisque 82% déclarent utiliser un écran (GPS, téléphone, écran professionnel, tablette) pendant la conduite.
Des usages variés et complexes toujours plus dangereux
Le nombre de conducteurs qui utilisent les fonctionnalités complexes de leur smartphone continue d’augmenter, bien que ces pratiques aient été plus occasionnelles que fréquentes en 2021, probablement en conséquence de la réduction du temps de conduite.
En 2021, 47% des conducteurs utilisent leur smartphone pour converser (43% en 2019). La conversation est loin d’être le seul usage du téléphone. La fréquence de l’écrit (lecture et écriture) et des opérations les plus complexes continue de progresser, tout comme l’usage du téléphone pour la navigation GPS.
38% des conducteurs reçoivent (36% en 2019) et 32% envoient des messages écrits de type SMS, messages instantanés, emails (28% en 2019). On notera que l’envoi et la réception des messages sont très liés à l’âge. Ils concernent surtout les moins de 45 ans, dont plus de la moitié des conducteurs de 25-34 ans. À noter, que près d’1/4 des conducteurs reçoit des messages complexes (accompagnés de photos/vidéos ou échangés à plusieurs interlocuteurs en même temps).
Le nombre de conducteurs qui surfent sur internet, prennent des photos ou font des jeux ou encore regardent des films… en conduisant semble se stabiliser voire diminuer. Fort heureusement les conducteurs qui se livrent à ces pratiques, qui restent parmi les plus perturbatrices pour la conduite, sont très minoritaires (15% vont sur internet et 4% pour les autres usages).
Le baromètre révèle que le smartphone est de plus en plus utilisé pour le guidage ; les conducteurs sont de moins en moins nombreux à utiliser un GPS nomade ou intégré : de 75% en 2018, ils passent à 51% en 2021, le téléphone étant davantage plébiscité pour la navigation. L’usage du GPS intégré est très lié aux km parcourus, vraisemblablement en lien avec le taux d’équipement des véhicules, tandis que celui du GPS nomade reste l’apanage des plus jeunes sans doute moins bien équipés.
Cette appétence pour des usages toujours plus complexes et variés est très inquiétante au vu de la dangerosité de ces comportements. On ne peut que souligner les risques en termes de sécurité routière qu’ils peuvent engendrer. Sans surprise, ce sont les plus jeunes (moins de 45 ans) et ceux qui roulent le plus (plus de 15000 km/an) qui sont les plus concernés.
« Malgré une diminution sensible de la conduite pendant la crise sanitaire, la proportion des conducteurs qui utilisent leur téléphone au volant n’a pas cessé d’augmenter en 2021. Si ceux qui utilisent les fonctionnalités les plus complexes de leur téléphone (conversation en visio, messages accompagnés de photos ou vidéos, messages à plusieurs) s’avèrent encore plus nombreux, une meilleure connaissance de leur smartphone leur en permet parfois un usage un peu moins dangereux, grâce aux fonctionnalités mains-libres. Ces usages restent néanmoins très risqués car ils génèrent des regards qui se révèlent souvent bien plus longs que prévu. » affirme Marie-Pierre Bruyas, Chercheuse à l’Université Gustave Eiffel.
Une conscience du risque et des comportements plus sécurisés
Le baromètre met en avant une certaine prise de conscience des conducteurs du risque et de la distraction engendrée par le smartphone au volant, bien que celui-ci soit considéré comme incontournable. Ceux qui ne téléphonent pas au volant considèrent que ce risque est très élevé et identique quel que soit l’usage du téléphone. Pour ceux qui téléphonent au volant, manipuler son téléphone est plus risqué que maintenir une conversation.
Des comportements qui ont tendance à devenir plus sécurisés avec une utilisation mieux gérée du smartphone au volant. Les 3/4 des conducteurs déclarent utiliser au moins occasionnellement un kit mains-libres (KML) intégré, mieux conçu pour être utilisé au volant. Plus de la moitié d’entre eux le font de façon systématique. Les moins de 25 ans, vraisemblablement moins bien équipés au niveau de leur véhicule, probablement moins récent, sont moins nombreux à utiliser un KML intégré (seul 1/3 de façon systématique) et lui préfèrent un KML nomade. Ce sont les plus âgés et ceux qui roulent le plus qui l’utilisent le plus.
Concernant les messages sous forme de texte, ils sont encore majoritairement lus, mais le nombre de conducteurs qui les écoutent a beaucoup augmenté en 2021 et passe de 26% à 41%. Les messages sont également encore majoritairement écrits, mais le nombre de conducteurs qui les dictent a également considérablement augmenté en 2021 et passe de 32% à 42%.
À noter, qu’une meilleure connaissance des fonctionnalités des smartphones en permet un usage un peu moins dangereux, grâce aux fonctionnalités mains-libres, dont sont dotés la plupart des téléphones d’aujourd’hui. On soulignera que l’usage des commandes vocales s’intensifie et est très lié à l’âge des conducteurs et, dans une moindre mesure, aux kilomètres parcourus.
Déterminants sociaux et comportementaux
L’âge et les kilomètres parcourus ne sont pas les seuls facteurs qui déterminent l’usage du téléphone au volant. L’addiction au téléphone, le goût pour les technologies, l’aisance avec laquelle les personnes manipulent leur smartphone ou l’utilité qu’elles lui confèrent, tout comme la pression exercée par l’entourage, sont aussi des facteurs qui accroissent son usage au volant.
Ceux qui n’utilisent pas leur téléphone au volant se distinguent en se déclarant plus respectueux du code de la route et plus réceptifs aux campagnes de sécurité routière sur les dangers du téléphone au volant. Ils trouvent inutile et compliqué son usage au volant et ne se sentent pas autant pressés par leur entourage pour l’utiliser.
Enfin, une tendance positive pourrait se dégager en 2021. L’interdiction du téléphone tenu à la main semble finalement plutôt bien acceptée, même par les utilisateurs du téléphone au volant. En revanche, une interdiction absolue ne rencontrerait que peu d’adhésion, en particulier pour la fonctionnalité GPS.
« Cette 5ème édition de notre baromètre vient confirmer les enseignements des années précédentes. Il semble que l’usage du smartphone au volant s’inscrive comme une habitude pour plus d’un conducteur sur deux. Les différentes législations ne parviennent pas à infléchir cette tendance. Conscients de la dangerosité de ces usages, les utilisateurs s’emploient à les sécuriser avec les technologies embarquées. » conclut Marc Rigolot, Directeur Général de la Fondation MAIF.
*Étude réalisée du 30 août au 27 septembre 2021 par l’Université Gustave Eiffel grâce au financement de la Fondation MAIF pour la recherche sur un échantillon représentatif de la population française de 2136 personnes âgées entre 18 et 65 ans.
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