Du nouveau dans l’étude des risques d'emballement thermique et d'explosion des batteries au lithium
Créé le 08/10/2024
La recherche sur la caractérisation, modélisation et prévention des risques d’emballement thermique et d’explosion des batteries au lithium avance ! Focus sur l’état des lieux établi autour de 4 objectifs : Caractérisation des batteries, identification des risques, analyse des défaillances et recommandations de prévention et de protection.
Caractérisation des batteries
Tout d’abord, en quoi consiste une batterie ? Il s’agit d’un ensemble de cellules composées de quatre éléments principaux, la cathode (électrode positive), l’anode (l’électrode négative), l’électrolyte et le séparateur). Il existe plusieurs types de cellules dont :
- Les poches, des cellules plates, sont enveloppées dans un matériau conducteur à la fois fragile, mais modulable. Elles possèdent une capacité d’énergie importante de 20 à 40 ampères-heures (Ah) et sont utilisées dans les téléphones portables et les véhicules électriques.
- Les cellules cylindriques disposent d’une enveloppe résistante, mais ont une capacité énergétique limitée de 2 à 3 Ah. Pour plus de performance, un nombre important de ces cellules est assemblé dans un module (ou pack) batterie. Les batteries cylindriques ont plusieurs applications, comme, par exemple des vélos et trottinettes électriques, des ordinateurs portables, de l’outillage, etc.
- Les cellules prismatiques ont l’enveloppe la plus résistante. Elles détiennent une capacité énergétique très importante, de 100 à 300 Ah, et sont employées dans l’industrie et les véhicules électriques.
Le rôle du Battery Management System (BMS)
Chaque type de batterie possède normalement un BMS, un système de gestion de la batterie - ou, en anglais, Battery Management System. Il gère l’interruption de la charge ou de la décharge des cellules et optimise le chargement de manière homogène d’une cellule à l’autre. Le BMS vérifie la température des cellules et protège les éléments de la batterie contre la surtension ou la sous-tension. Il prolonge la durée de vie de la batterie dans une plage d’utilisation optimisée et estime également le vieillissement de la batterie via le « SoH » (State of Health, état de santé) et indique le nombre de cycles effectués. Grâce au BMS, il est possible de connaître le temps réel de la charge de la batterie via le « SoC » (State of Charge). Plusieurs batteries en parallèle ou en série peuvent être liées au BMS afin de gérer des systèmes plus puissants ou plus capacitifs. Enfin, le BMS participe à la sécurité de la batterie, pouvant intervenir en cas de surchauffe de cette dernière.
Identification des risques liés à l’usage des batteries au lithium
L’équipement des ménages Français conduit à qu’en moyenne 99 % des Français possèdent un téléphone portable et 90 %, un ordinateur portable. Cependant, le niveau de risque d’accident de batterie lié à ces deux appareils n’est pas comparable. Si les batteries des ordinateurs sont à l’origine de seulement 14 % de ces accidents, plus d’1 accident de batterie sur 2 vient des batteries de téléphones portables. Peut-être maltraitons-nous nos téléphones ? Voici une liste de comportements à risque à éviter pour un usage plus sûr de nos appareils :
- Laisser la batterie se décharger complétement ;
- Charger l’appareil avec un autre chargeur que celui d’origine, ou celui qui est recommandé ;
- Exposer son appareil à la chaleur, au soleil et à l’humidité ;
- Charger un appareil la nuit, et sans surveillance.
En savoir plus sur les usages à risques avec ce rapport détaillé.
Les défaillances et leurs principaux facteurs déclencheurs
Il y a très peu de statistiques qui regroupent tous les incidents liés aux problèmes des batteries au lithium en France ou à l’étranger. Souvent, il faut attendre la fin des enquêtes, ou se renseigner sur les faits diffusés dans la presse. Cependant, quelques études spécifiques en Amérique du Nord ou à Londres s’appuient sur des statistiques issues des services de sécurité incendie sur place.
En France, nous disposons d’informations relatives aux accidents industriels liés aux incendies ou explosions et aux rejets de matières polluantes, qui incluent les évènements liés aux batteries au lithium.
Selon le BARPI, bureau d’analyse des risques et pollutions industriels, en 2022, les origines de ces accidents provenaient soit d’un défaut matériel (à la suite d’un problème avec le BMS), soit de l’intervention humaine (en raison d’une absence de double contrôle des packs, ou de l’inversion d’un pack batterie avec un autre en réparation et sa mise en charge).
Dans les deux cas, ces défauts sont susceptibles de mener à un emballement thermique.
Les risques sont accrus si le lieu de l’accident ne dispose pas de moyens d’immersion sur le site, ou de dispositifs de lutte incendie adéquates (systèmes de sprinklage et trappes de désenfumage).
Le cadre de cette étude concerne la défaillance « énergétique » liée majoritairement à un court-circuit interne qui mène à l’emballement thermique ou l’auto-inflammation. Qu’est-ce qui est à l’origine d’un court-circuit interne ?
- Une atteinte mécanique à la cellule, suite à un écrasement ou une perforation qui entraine une déformation puis une déchirure du séparateur de la cellule ;
- Une atteinte électrique liée à la croissance dendritique qui vient à percer le séparateur ;
- Une atteinte thermique en raison d’une température élevée qui fait fondre le séparateur.
Les 5 causes principales de défaillance du séparateur d’une batterie au lithium
- Une cause environnementale, liée à une exposition chimique, une chaleur excessive ou une charge au froid ;
- Un défaut de conception via un mauvais assemblage ou soudage, des bavures, la contamination ou encore un désalignement des électrodes ;
- Un problème mécanique après une chute, un choc ou un impact, en raison des vibrations ou d’une perforation du séparateur ;
- Un problème électrique lié à une décharge profonde ou une surcharge de la batterie, un déséquilibre électrique, ou à un court-circuit externe ;
- Le vieillissement de la batterie qui impacte sa charge et sa décharge, le niveau de maintenance ou encore la croissance dendritique - un phénomène qui se produit lors de la recharge des batteries au lithium avec des projections de métal en forme de fougères. Cette accumulation à la surface du lithium peut percer l’électrolyte solide passant d’une électrode à l’autre pour créer un court-circuit.
Conséquences des défaillances des batteries au lithium
Un lien direct existe entre le nombre de cellules d’une batterie, son niveau de charge et la taille de l’incendie ainsi que la quantité des émissions gazeuses. Plus une batterie est chargée, plus elle contient de l’énergie, et plus l’incendie qui se déclare va être puissant. En effet, une batterie chargée à 100 % possède un taux de dégagement de chaleur qui se positionne entre celui du gasoil et du fuel ! Et plus il y a de cellules dans un pack batterie, plus la chaleur qui s’en dégage est intense.
Il y a également un lien important entre les émissions gazeuses et le niveau de charge d’une cellule. Plus le niveau de charge est important, plus la production de composés gazeux est élevée (dioxyde de carbone, monoxyde de carbone, oxyde d’azote, souffre dioxyde, acide chloridrique et fluorure d’hydrogène entre autres).
Une vigilance particulière est à porter au dégagement de fluorure d’hydrogène qui peut être mortel et génère de forts impacts en cas d’inhalation, de contact avec la peau ou d’ingestion. Ainsi, sur le long terme, l’exposition au fluorure de carbone peut entraîner des douleurs articulaires et une limitation de certains mouvements.
Prévention des risques et protection – batteries au lithium
Des campagnes de sensibilisation aux risques des batteries au lithium existent pour les particuliers à l’étranger. Un bon exemple est « Take Charge of Battery Safety /CHARGE » (Prendre le contrôle de la sécurité des batteries) développé par le Fire Safety Research Institute d’UL Research, adhérent à l’AFNOR :
- Choix de composants adaptés et certifiés (marques identiques) ;
- Habitudes d’utilisation et de stockage ;
- Attention particulière aux signes avant-coureurs ;
- Recyclage dans les points de collecte dédiés* ;
- Gagner rapidement une sortie en cas d’incendie ;
- Education sur les pratiques sécuritaires.
Les bonnes pratiques des batteries au lithium :
- Suivre les instructions du fabricant concernant le chargement et le stockage ;
- Toujours utiliser le cordon et l’adaptateur secteur du fabricant, conçu pour l’appareil ;
- Conserver les batteries à température ambiante ;
- Ranger les batteries loin de tout objet inflammable ;
- Charger les batteries dans des zones éloignées de combustibles ;
- Cesser d’utiliser la batterie en cas de surchauffe, de dégagement d’odeur, de changement de forme ou de couleur, de bruit inhabituel provenant de l’appareil ;
- Entretenir et vérifier annuellement le bon fonctionnement du détecteur de fumée individuel.
Et voici ce qu’il ne faut surtout pas faire !
- Ne pas utiliser de batteries ou de chargeurs de rechange (ou génériques) ;
- Ne pas se brancher sur une multiprise et ne pas surcharger les prises de manière générale ;
- Ne pas surcharger la batterie et ne pas la laisser se charger pendant la nuit ;
- Ne pas charger un appareil sous son oreiller, sur un lit ou un canapé ;
- Ne pas laisser les vélos, trottinettes ou scooters électriques sans surveillance lorsqu’ils sont en charge ;
- Ne pas bloquer l’entrée ou la sortie principale d’une pièce ou d’un espace ;
- Dans le cas des batteries usagées : ne pas jeter les batteries dans les poubelles ménagères (tri, ordures ménagères). Déposer les piles/batteries dans un point de collecte dédié (identifiables sur des sites internet comme jerecyclemespiles.com ou via les sites dédiés aux déchetteries).
*Il s'agit d'une gestion DEEE (Déchet d’Equipement Electrique et Electronique) avec, soit depot dans une déchetterie, soit collecte par un professionnel au sein d’une entreprise. Ils feront alors un démantèlement et la batterie partira en filière dédiée « Piles et accumulateurs »