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La gestion de la pandémie et les sciences comportementales

La gestion de la pandémie de coronavirus vue sous l’œil des sciences comportementales, et l'espoir qu'elle suscite

New normal covid 19

 Créé le 30/09/2020

Face à la pandémie de coronavirus, il semble que la préoccupation pour la santé prenne le dessus sur l'économie : pour empêcher la diffusion du virus et sauver des vies, les entreprises et les organismes publics ralentissent et demandent aux employés et aux citoyens de vivre et de travailler différemment, en acceptant des conséquences économiques dramatiques. Ce qui nous montre qu’il est possible que l’arbitrage entre un risque économie et risque santé tourne à l’avantage de la santé.

Devrait-on dire « enfin ! » ?

par Etienne Bressoud, Directeur Général Délégué, BVA Nudge Unit.

Quelques constats à l'heure de la pandémie

Depuis combien de temps devrions-nous passer du « business as usual » au « développement durable », en suivant les conseils éclairés de Jeffrey Sachs ? Face au réchauffement climatique n'est-ce pas le moyen de sauver l'humanité ? J'écris volontairement « sauver l'humanité » plutôt que « sauver la planète », car la planète survivra au réchauffement climatique alors que l'humanité pourrait ne pas y survivre.

Savons-nous que la pollution atmosphérique provoque des décès ? Nous le savons. Avons-nous changé nos pratiques économiques pour éviter ces décès ? NON.

Savons-nous que le coronavirus provoque des décès ? Nous le savons. Avons-nous changé nos pratiques économies pour éviter ces décès ? OUI.

Alors, qu'est-ce qui explique cette différence entre la gestion d'une pandémie de coronavirus et la gestion de la pollution atmosphérique, puisque les deux peuvent entraîner la mort ? Quelle différence, s’il en est une, entre les décès dus aux coronavirus et ceux dus à la pollution atmosphérique ?

L'importance  du biais de préférence pour le présent

Les sciences comportementales permettent de comprendre cette différence grâce au « biais de préférence pour le présent ». Ce biais explique que, lorsque nous sommes amenés à prendre une décision, nous donnons plus de poids aux conséquences immédiates qu’aux conséquences futures. Le coronavirus qui sévit aujourd’hui provoque des décès immédiats. La pollution atmosphérique qui sévit aujourd’hui provoque des décès futurs. Nous nous soucions davantage des décès immédiats causés par le coronavirus que des profits économiques immédiats. Mais, nous nous soucions moins des décès futurs liés à la pollution atmosphérique que des profits économiques immédiats.

Le coronavirus nous donne au moins l'espoir que nous pouvons changer nos pratiques économiques pour sauver des vies

Et si, puisque nous sommes capables de ralentir l’économie en réaction à des décès immédiats, nous changions nos pratiques économiques pour prévenir de décès futurs ? Je prends le pari que, tant que le biais de préférence pour le présent existera, nous aurons du mal à le faire. Daniel Kahneman, prix Nobel d’économie, a dit un jour que s'il avait une baguette magique il éliminerait le biais de sur-confiance. Aujourd'hui, si j'en avais une, j'essaierais simplement d'éliminer le biais de préférence pour le présent.

Crée le 12/05/20

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